Bateria de samba

Chaque école de samba organise son défilé autour d’une chanson, le Samba de enredo (le samba à thème), mais le cœur battant d’une école est sa batterie de percussions, la bateria.

Comportant de 60 à 320 rythmistes selon la taille et le niveau de l’école de samba, la bateria donne la cadence et porte toute l’école dans son battement rythmique que l’on entend arriver de très loin, même sans sonorisation !

Répétition technique de la bateria de Acadêmicos de Grande Rio en 2019

Comme pour une batterie dans les orchestres européens, elle est constituée de plusieurs éléments : les basses, qui marquent le temps, des instruments d’accompagnement, qui forment une sorte de ciment sonore reliant les basses et apportent le swing, et des instruments apportant des variations rythmiques répondant aux paroles de la chanson.

La colonne vertébrale

Les basses sont constituées par les surdos, gros tambours profonds dont le son porte particulièrement loin. On les décompose en général en trois familles de surdos accordées entre elles, ceux qui jouent les deux notes les plus basses marquant alternativement la pulsation — surdos de primeira et de secunda—, et ceux qui jouent la note la plus aigüe assurant un accompagnement rythmique variant au gré de la chanson selon un arrangement défini — surdos de terceira.




Les trois surdos en action chez Estácio de Sá

Les surdos portent littéralement le temps, ce sont eux qui donnent la cadence de l’ensemble, et c’est pourquoi on parle souvent d’eux comme de la colonne vertébrale de la bateria. Tout repose sur eux et il s’agit là d’une énorme responsabilité pour cette section qui constitue un bon quart de la batterie.

Certaines écoles sont connues pour la signature sonore particulière de leurs surdos : Mocidade Independente de Padre Miguel par exemple, dont les primeiras et les secundas ont des notes inversées par rapport aux autres écoles, ou encore Estação Primeira de Mangueira, qui ne possède pas de surdos de secunda…

Beaucoup de liant

Les instruments d’accompagnement sont les caisses claires, appelées caixas, les tarols, les répiniques, les chocalhos, et pour certaines écoles, les frigideiras (littéralement, poêles à frire). Ces différentes familles d’instruments apportent un remplissage reliant les basses entre elles ainsi que le swing caractéristique du samba, ce petit sautillement qui ne laisse aucune hanche indifférente et provoque inévitablement les trémoussements de tous ceux qui les entendent…

Rythme des caixas de Unidos da Vila Isabel

Les tarols sont une forme allégée de caixas, destinées à être jouées au niveau de l’épaule. Caixas et tarols constituent la section de loin la plus représentée dans la batterie, avec environ un tiers de tous les rythmites de la batterie. Le phrasé rythmique des caixas et des tarols est lui aussi une autre des signatures sonores caractéristiques de chaque école.

Les repiniques et les chocalhos représentent quant à eux chacun environ 10% des membres de la batterie. Le repinique se présente comme un surdo réduit, se jouant avec une baguette et une main. Les frigideiras quant à elles ne sont présentes que dans certaines écoles, comme chez Beija Flor de Nilópolis par exemple.




Frigideira en action chez Beija Flor de Nilópolis

Les finitions

D’autres sections d’instruments apportent des variations rythmiques et mélodiques, ce sont :

  • les cuicas, apportant un peu de mélodie et beaucoup de swing
  • les tamborims, accompagnant le chant de leurs variations rythmiques

les agogôs, renforçant les effets mélodiques de leurs deux ou quatre cloches accordées

Phrasé d’agogôs à deux cloches de Mocidade Independente de Padre Miguel

Ces trois sections, souvent situées vers l’avant de la bateria pour que le public profite pleinement de leur son, ont un rôle musical aussi essentiel que la grosse locomotive constituée par les surdos et les instruments de liaison.

Leur travail rythmique repose sur des séquences mémorisées par cœur lors de répétitions interminables, qu’on appelle arrangements ou desenhos. De plus, comme si cela ne suffisait pas, ces séquences sont dépendantes de la chanson, venant faire contrepoint ou au contraire porter la voix des interprètes avec force chorégraphies de groupe.

Exemple d’arrangement de tambours, chocalhos et agogos de Portela

Enfin, quelques solistes amènent une touche de virtuosité à l’ensemble en exécutant de temps en temps des variations ou des appels auxquels tout le reste de la batterie va répondre. Ce sont les experts es-repinique, en général entre deux et six, qui assument ce rôle essentiel pour soutenir la direction musicale.




Petit solo de repinique sur la fin d’une répétition de rue de Unidos da Tijuca

Un chef et ses adjoints

Tout cet ensemble n’aurait pas l’efficacité qu’on lui connaît sans une direction claire et des instructions précises communiquées avec énergie !

Le mestre de bateria, véritable chef d’orchestre de la batterie, situé tout à l’avant de la bateria, donne ses indications pour accompagner la chanson, pour passer les breaks qu’il a composé au bon moment sur tel couplet à la fin de tel refrain, ou pour maintenir le tempo initial malgré la fatigue d’un défilé de parfois plus d’une heure.

La batería de Acadêmicos de Salgueiro, dirigée par Mestre Marcão en 2017

Il est relayé en cette tâche par une équipe de directores, véritables adjoints répartis à des endroits stratégiques de l’ensemble, courant parfois à droite et à gauche pour être sûrs que leurs instructions ont bien été vues à temps par tout le monde, sifflant à qui mieux mieux dans leurs sifflets d’arbitre pour attirer l’attention des rythmiques parfois déconcentrés par une caméra, un photographe, une danseuse, les plumes du costume du collègue placé devant lui ou tout simplement le public massé dans les gradins…

Répétition technique de la batería de União da Ilha do Governador en 2018




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